Vaches et veaux : leur séparation est au cœur de la production laitière
Comme tout mammifère, pour produire du lait, les vaches doivent mettre au monde un petit, le veau. La pratique généralisée de l’industrie laitière consiste à séparer le petit de sa mère dès ses premières heures de vie. On donne alors au veau une poudre de lait de remplacement commerciale et on traie la vache afin de récolter son lait pour la consommation humaine. L’image bucolique de la mère et de son petit en liberté dans un champ est donc loin d’être représentative des pratiques standards au Canada.
Voici des images tournées sur une ferme canadienne en 2021.
Merci à Animal Justice pour les images vidéos fournies.
L’instinct maternel des vaches : qu’en dit la science ?
Pendant cinq ans, soit la durée de vie moyenne des vaches laitières, les vaches donneront naissance à un veau par année environ, lequel leur sera, à chaque fois, retiré presque immédiatement. À la suite de cette séparation, des vocalisations très spécifiques sont émises par les vaches9, qui peuvent mugir durant des jours.
Eva Mutua, chercheure diplômée en Applied Animal Behaviour and Animal Welfare de la Royal Dick School of Veterinary Studies de l’Université d’Édimbourg, indique que les vaches sont particulièrement enclines à exprimer des comportements maternels et que, lorsqu’elles en ont la possibilité, le fait de pouvoir prendre soin de leur veau améliore de façon significative leur bien-être et augmente même, dans certains cas, leur production de lait10. La séparation de la mère et du veau, en revanche, cause de façon répétée une importante souffrance psychologique aux vaches laitières ainsi qu’à leurs petits.
Les bénéfices documentés de garder le veau près de sa mère
Les avantages d’une proximité prolongée entre la vache et son veau sont maintenant largement documentés. D’abord, les vaches qui allaitent leurs veaux présentent moins de mastites que les vaches traites à la machine11. On note aussi un taux de croissance plus élevé et une diminution de la mortalité chez les veaux restés près de leur mère12. On observe également que le veau développe de meilleures compétences sociales lorsqu’il a la chance de demeurer près de sa mère13.
Cette séparation forcée de la vache et du veau, qui est devenue la norme au Canada, constitue pourtant une pratique relativement récente, qui date d’à peine une centaine d’années. En effet, comme l’observe Kerstin Barth, chercheuse à l’Institut Thünen : « Les vaches et les veaux ont été gardés ensemble pendant des milliers d’années. Les fermiers devraient bien connaître cet élevage, mais c’est comme si nous avions oublié comment les bovins laitiers se comportent ensemble et comment ils réagissent lorsqu’ils sont séparés »14.
Le veau, sous-produit de l’industrie laitière
Au sein de l’industrie laitière, lorsque la vache donne naissance à un mâle, celui-ci n’est d’aucune utilité pour la production laitière. Il sera donc revendu pour sa viande. Le Québec produit ainsi la majorité des veaux de lait au Canada. En 2020, près de 160 000 d’entre eux ont été abattus15.
Après la séparation du petit de sa mère, la norme au pays consiste à le garder dans un enclos individuel de 140 à 170 jours (de 4 à 6 mois)16. Les études indiquent pourtant que l’isolation complète des jeunes veaux induit un stress important chez ces animaux sociaux et ne permet pas un développement comportemental normal17.
Voici un aperçu de l’habitat des veaux en 2021 sur une ferme canadienne
Merci à Animal Justice pour les images vidéos fournies.