Message d’Élise Desaulniers, directrice générale de la SPCA de Montréal
Des frontières, écoles et commerces fermés, des avions cloués au sol. Les grands événements sportifs et culturels annulés. Des rues vides, des morgues qui se remplissent, des soignants qui doivent faire des choix déchirants. Si on m’avait décrit cette scène il y a à peine quelques semaines, j’aurais cru à la prémisse d’un mauvais film hollywoodien, avec des héros en sarrau, une histoire d’amour en parallèle et de la musique un peu stressante en trame de fond.
C’est pourtant la réalité dans laquelle chacun de nous a été plongé, d’un seul coup et sans avoir le temps de prendre son souffle. La crise a débuté il y a un mois et nous commençons seulement à prendre conscience de l’ampleur du choc que nous avons subi, à trouver une certaine routine, du confort et du réconfort dans un quotidien où tout est si familier et étrange à la fois.
À l’échelle d’un refuge comme le nôtre, le bouleversement est un peu le même. Nous avons dû revoir l’ensemble de nos services pour nous concentrer sur les urgences. Pourquoi? D’abord pour protéger nos employé.es, nos bénévoles, leurs familles et le public en général. Aplatir la courbe, pour reprendre l’expression consacrée, implique de rester à la maison. On le sait maintenant, la COVID-19 peut être transmise par des personnes asymptomatiques. Ainsi, chaque déplacement, chaque visite au refuge augmente les risques de contagion. La meilleure façon d’aider, c’est de ne pas nuire. Ce qui veut dire rester chez soi.
Ensuite, parce que le matériel médical se fait rare. Masques, gants et même médicaments doivent être préservés pour sauver des vies. Le propofol utilisé lorsqu’un animal est mis sous anesthésie générale lors des chirurgies, comme les stérilisations, fait partie des médicaments en pénurie au Canada et partout dans le monde. La demande pour ce puissant sédatif a explosé dans les derniers mois puisqu’il permet de garder les patients endormis pendant qu’ils sont sous respirateur.
Au même titre que les services essentiels pour les humains sont préservés, la SPCA de Montréal continue de répondre aux urgences et d’accepter les animaux gravement blessés, malades ou victimes de cruauté. Parce qu’il est important que les animaux restent le moins longtemps possible au refuge, les services d’adoption et de familles d’accueil demeurent ouverts, mais ils fonctionnent au ralenti et sur rendez-vous, en respect des règles de distanciation.
Les seules chirurgies pratiquées par nos vétérinaires sont celles d’urgence, lorsque la vie d’un animal est en danger. Nous avons donc dû, à contrecœur, suspendre nos services de stérilisation ciblée et le programme de stérilisation de chats communautaires (CSRM). Après la longue bataille que nous avons livrée pour que la stérilisation des chats, des chiens et des lapins devienne obligatoire à Montréal et pour que les programmes de CSRM soient implantés sur toute l’île, il est difficile pour nous de voir nos tables de chirurgie rester vides. Mais il faut comprendre que la situation actuelle est exceptionnelle. La priorité, en ce moment, c’est de combattre la COVID-19 et, pour arriver à le faire efficacement, nous devons y consacrer l’entièreté de nos efforts et de nos ressources, ce qui implique de mettre toutes autres priorités en attente.
Chose certaine – et les experts en médecine de refuge partout en Amérique du Nord s’entendent là-dessus –, les progrès réalisés au cours des années passées ne seront pas effacés par quelques mois de pause.
Ces dernières semaines, nous avons collectivement renoncé à beaucoup pour sauver des vies. Ce grand bouleversement de notre quotidien n’est pas vain, puisque nous allons, ensemble, réussir à neutraliser la COVID-19. Et ainsi, pouvoir continuer à prendre soin des animaux.
Pour plus d’information, consultez notre avis important.
Élise Desaulniers
Directrice générale
SPCA de Montréal